Un abécédaire pour la deuxième décennie du XXIè siècle

2020 ! Le nouveau siècle a déjà parcouru vingt années. Nous voici totalement entrés dans ce XXIème si futuriste hier encore. Alors qu’une décennie s’achève, le moment est venu de nous poser pour passer en revue quelques faits remarquables et significatifs d’une période qui aura vu Nicolas Sarkozy, François Hollande et Emmanuel Macron présider la France. Pour raconter la France en cette deuxième décennie du XXIème siècle, voici la première partie de notre abécédaire.
A ça commence bien ! Tambour battant, de manière extrêmement positive et c’est tant mieux, car la première lettre de l’alphabet nous évoque the Artist. Le film arrive en tout début de décennie, en 2011, cette année-là fut un cru exceptionnel pour le cinéma français. The Artist de Michel Hazanavicius avec Jean Dujardin et Bérénice Béjo fut couvert de succès dès sa sortie. Il remportera en 2012 l’oscar du meilleur film, du meilleur réalisateur, du meilleur acteur et de la meilleure actrice dans un second rôle pour Bérénice Béjo. Le cinéma français n’avait pas connu pareil triomphe. Un autre grand film marquera les esprits en 2011, décidément une année faste : Intouchables des amis Olivier Nakache et Eric Toledano qui consacra l’acteur Omar Sy.
A nous fait penser au grand Charles Aznavour mais aussi à la dernière née de la chanson française et Aznavour qui adorait voir les nouvelles générations perpétuer ce qui a fait la grandeur de la chanson française a assisté aux premiers pas d’Angèle. La petite Belge avec Stromae, est la digne héritière des Jacques Brel, Arno ou Maurane qui ont tellement donné à la chanson francophone.
A enfin, comme "application". Ce mot qui désigne les petits logiciels de nos smartphones s’est définitivement imposé au cours de cette décennie ; parmi les applications qui nous ont envahis, nous en retiendrons une, bien française, le fait est assez rare pour être souligné :
B pour BLABLACAR. Depuis quelques années, il est devenu extrêmement rare de trouver des autostoppeurs sur le bord des routes. Changement d’habitude dû peut-être à cette application devenue très populaire. Il fallait y penser : créer un moyen de mettre en relation des automobilistes et des passagers qui se rendent au même endroit. Ce service de covoiturage au départ gratuit, deviendra payant en 2011, les passagers versent le prix de leur voyage à la plateforme qui se charge de rémunérer l’automobiliste encaissant au passage une commission. Parti de France, le service s’est, depuis, étendu à de nombreux pays. BLABLACAR continue à se développer, devenant une compagnie de car, avec les BLABLABUS (anciennement OuiBus de la SNCF). Quant au nouveau service BLABLALINES, il concerne le covoiturage de proximité domicile-travail. Il compte en ce début de 2020, un million de membres, 300 000 trajets sont disponibles chaque jour, et il comptabilise 45,4 millions de kms parcourus.
B nous ne parlerons pas ici du Brexit qui va compliquer la vie des 300 000 Français vivant en Angleterre et des 400 000 Anglais en France.
C et Charlie nous vient automatiquement à l’esprit. Il y eut l’avant et l’après Charlie Hebdo. En ce mois de janvier 2020, la France se souvient et rend hommage aux victimes de ces fous de Dieu. On met trop souvent en avant le nom des assassins alors que l’on tait ceux des victimes, anonymes fauchés par le bras armé de cette idéologie mortifère. Ils étaient très connus les dessinateurs Cabu, Charb, Honoré, Tignous et Wolinski, ainsi que l'économiste et chroniqueur Bernard Maris, et la psychanaliste Elsa Cayat, d'autres ne l'étaient pas comme le correcteur Mustapha Ourrad, le policier Franck Brinsolaro, chargé de la protection de Charb, Michel Renaud, le fondateur du festival Rendez-vous du carnet de voyage, et l'agent de maintenance Frédéric Boisseau. Tous furent assassinés le 7 janvier dans les locaux du journal. Ahmed Merabet un autre policier fut exécuté devant le siège de Charlie Hebdo. Le 8 janvier, la policière municipale Clarissa Jean-Philippe fut abattue d’une balle dans le dos. Le vendredi 9 janvier, Philippe Braham, Yohan Cohen, Yoav Hattab et François-Michel Saada furent assassinés alors qu’ils faisaient leurs courses dans la supérette Casher, Porte de Vincennes.
Hélas, beaucoup d’autres tomberont sous le coup de la barbarie, notamment le 13 novembre 2015 puis le 14 juillet 2016 à Nice, fauchés par la folie qui avait commencé en France en mars 2012 dans la région de Toulouse avec l’assassinat de trois militaires français : Imad Ibn Ziaten, Abel Chennouf et Mohamed Legouad, puis par les enfants dans une école juive de Toulouse : Myriam Monsonégo, Gabriel et Arieh Sandler ainsi que leur père et enseignant, Jonathan Sandler froidement exécutés, parce que juifs, par le premier terroriste lié au djihad qui sévit en France.
D Hélas, la lettre D reste également tâchée de ce même sang que les Djihadistes liés à Daesh ont répandu notamment en Syrie, en Irak et en Europe. Beaucoup de jeunes Français chrétiens ou musulmans se sont convertis à cette idéologie salafiste obscurantiste radicalement différente de la religion musulmane des pays du Maghreb. Cette question sociétale extrêmement complexe a fait l’objet d’une littérature abondante tout au long de cette période. Nous signalerons ici, la dernière publication celle du chercheur Hugo Micheron qui signe un remarquable travail : "Le Jihadisme français. Quartiers, Syrie, prisons" Gallimard, janvier 2020. Pour ce qui est d’œuvres de fiction, citons aussi le roman de Fouad Laroui "Ce vain combat que tu mènes au monde" et les films "Le ciel attendra" (2016) de Marie-Castille Mention-Schaar et "L’adieu à la nuit" (2019) d’André Téchiné. Le combat contre le djihadisme se déroule aussi et avant tout hors d'Europe comme Abderrahmane Sissako nous le rappelle en 2014 avec son excellent film "Timbuktu". Pour ce qui est de la littérature, nous mettons en avant le roman jeunesse d’Emilie Frèche "Je vous sauverai tous" qui fait l’objet de la fiche pédagogique de ce mois de janvier 2020.
Rappelons qu’entre 2012 et 2018, 2000 djihadistes français ont quitté la France, partis rejoindre l’Etat Islamique. 450 y seraient morts et 300 seraient revenus en France.
E Cette décennie restera comme celle de la naissance de la prise de conscience généralisée des dangers liés à l’énergie fossile et du virage vers l’électrique et autres sources d’énergie non polluantes. Electrique, la voiture des prochaines années doit l’être ou tout au moins hybride. En début de cette année 2020, quelques 205 000 véhicules électriques circulent dans l’Hexagone et, si l’on en croit le magazine AUTO PLUS, l’automobiliste français adepte de l’électrique est un homme, un citadin de 56 ans. 75% d'entre eux ont acheté une Renault Zoe mais leur foyer possède un deuxième véhicule ou plus, qui se révèle être le plus souvent à moteur diesel ! Avec Zoé, sa petite voiture électrique capable de parcourir environ 400 kms, Renault est incontestablement le leader en France. En Europe, elle arrive seconde derrière la Model 3 de Tesla. Le tout électrique guette : en 2040, le moteur thermique sera banni d’Europe et au début de la prochaine décennie, une voiture sur trois devra être électrique. Les enjeux économiques et industriels sont gigantesques tout comme les défis technologiques, notamment en matière de batteries, que doit relever le vieux continent pour ne pas perdre son indépendance vis-à-vis de la Chine ou des Etats-Unis. C'est dans ce sens qu'un "Projet important d’intérêt européen commun" a été lancé en décembre 2019 par la Commission Européenne. Communément appelé "l’Airbus des batteries", le projet doit mobiliser dans un premier temps, 3,2 milliards d’aides publiques de sept pays pour développer une industrie européenne de cellules de batteries.
F comme "Fake news" devenus "Infox" en français. Elles auront proliféré tout au long de ces dix dernières années. Les médias en général traversent, en France comme ailleurs, une crise de confiance de la part des lecteurs et auditeurs. c'est ce que souligne à nouveau une vaste étude internationale Ipsos global advisor menée en janvier et février 2019 par l’institut IPSOS auprès de 19 000 personnes dont un millier de Français. Elle révèle des résultats alarmants pour la démocratie. En cinq ans, le taux de confiance envers les médias a chuté. Ils ne sont que 36 % des Français interrogés, à considérer que l’on peut faire confiance aux journaux et magazines, alors que 48% pensent que les informations de la presse écrite sont pour une large part des infox ! Et seuls 37% croient que la télévision et la radio sont dignes de confiance. Les informations obtenues par les réseaux sociaux et les proches profitent, elles, de ce désaveu.
F comme France Inter. Dans cette ambiance de suspicion, félicitons la station phare de Radio France qui a fêté ses 50 ans en 2013. De septembre 2014 à aujourd'hui elle aura gagné un million d’auditeurs et compte actuellement quelques 6 500 000 auditeurs qui en font la radio la plus écoutée de France. Un succès amplement mérité tant la qualité de ses programmes est exemplaire et nous ne pouvons que nous réjouir qu’une telle station soit plébiscitée par les Français… et hors de France grâce à l'application Radiofrance que nous vous encourageons à télécharger !
La suite de notre abécédaire de la décennie, le mois prochain
Photo du journal Libération de la manifestation du 11 janvier 2015
© Alexandre Garcia - Centre International d'Antibes