Corbeyran est notamment à l’origine d’une saga qui se poursuit encore aujourd’hui, Le chant des Stryges. D’une manière générale, la diversité ne fait pas défaut à son œuvre : tranche de vie, histoire, patrimoine, science-fiction, thriller… Ici, avec Luca Raimondo il nous plonge dans une Venise de la fin du XIXème siècle.

C'est là que le détective Carnacki est contacté par Luca Belmonte car son ami, Carlo Murini, se terre chez lui et ne sort quasiment plus de sa chambre, refusant même de se nourrir. Lointain ancêtre des Ghostbusters, Carnacki est un Arsène Lupin du fantastique. Il va mener l’enquête, fouiller dans le passé d’anciennes familles vénitiennes pour débusquer secrets et malédictions. Clichés ? Peut-être. Classique, certainement. Une intrigue dans le goût de l’époque qui l’a vu naître et qui connaissait un certain succès en Europe, de Théophile Gauthier -La morte amoureuse- à Bram Stoker, père de Dracula, en passant par certaines nouvelles de Maupassant, dont Le Horla.

Le XIXème siècle finissant et le début du XXème siècle n’en finissent pas d’inspirer artistes et romanciers. Voilà un excellent cadre pour adapter des aventures d’un détective imaginaire, Carnacki, capable de traquer et de combattre des fantômes venant hanter les pauvres vivants. On doit ce James Bond de l’étrange à l’écrivain anglais William H. Hogdson. Ce dernier a quasiment sombré dans l’oubli et n’est plus lu que par une poignée de connaisseurs. En attendant, les lecteurs que nous sommes savourent cette plongée dans une Venise aussi fictive que réelle, celle d’un Marcel Proust -qui visita la cité des doges et fut contemporain de Hogdson, ou même d’un Thomas Mann (on songe à La mort à Venise). On se pose devant cette histoire comme devant une série en streaming. Tout y est : décors, personnages, spectres, brumes, palais vénitiens. Le talent d’aquarelliste de Luca Raimondo fait le reste.

Les spectres de Venise démontre, si besoin était, que la veine classique du Neuvième Art ne s’éteindra jamais. On reviendra toujours à la Belle Époque, on aura toujours un peintre œuvrant dans la bande dessinée, on aura toujours un classique ou un récit méconnu à adapter. Et la figure du détective solitaire et doué plaira toujours.